Il y a quelques semaines, le pont Champlain faisait les manchettes: en piteux état, il inquiète tout le monde… Ce pont a eu 50 ans en 2012. Lorsque sa construction a été complétée en 1962, au coût de 35 millions de dollars, sa présence a changé le visage de Montréal et en particulier, celui de l’île des Soeurs. Un ouvrage a été publié en 1962 par Porcupine Publishing sous le nom de The Champlain Bridge et c’est un recueil assez impressionnant qui montre en détail la naissance du pont Champlain, tel que photographié par Hans Van Der Aa. Les photos ci-dessous sont extraites de cet ouvrage.
La première image que je trouve particulièrement fascinante se trouve ci-dessous, et elle montre l’impact de ce pont sur l’île des Sœurs. Cette île, aussi connue sous le nom d’île Saint-Paul, était la propriété de sœurs de la Congrégation Notre-Dame depuis les années 1700, et ce jusqu’en 1957. Ces terres étaient toutes vouées à l’agriculture, pour fournir la communauté en denrées comestibles. La suite est assez triste: le manoir des sœurs, abandonné depuis 1957, a brûlé en 1960; plusieurs lieux de cette île ont été nivelés et remblayés par des roches et des ordures provenant de Verdun; finalement, plusieurs bâtiments de type « tour » ont été érigés, donnant l’aspect actuel aux lieux. On voit, sur la photo ci-dessous, un genre de voie d’accès temporaire créée par un remblai de pierre qui traverse le bras du fleuve entre Verdun et l’île des Sœurs…
Ci-dessous, quelques images de Brossard : c’était aussi, en 1962, un milieu agricole. On voit sur ces photos quelques bâtiments de fermes flanqués d’arbres : une campagne paisible, loin de son état d’urbanisation actuel. C’est aussi assez surprenant de voir comment le trafic qui provient du pont en direction sud se trouve à aboutir sur une petite route rurale qui longe le fleuve… on imagine mal une telle configuration aujourd’hui !
C’est également surprenant, lorsqu’on s’y arrête, de voir comment le pont Jacques Cartier ou même le pont Victoria s’en tirent mieux que le pont Champlain, en termes de résistance à l’usure… Ces deux ponts ont pourtant 80 et 150 ans respectivement, contrairement èa 50 ans pour le pont Champlain. Le problème du pont Champlain, c’est qu’il a été construit en béton précontraint, ce qui était une technique toute nouvelle pour les années 50, lorsque les devis du pont ont été tracés. Apparemment, l’entretien de ce pont, dont les entrailles vitales sont impossibles à inspecter une fois installées, n’était pas au cœur des préoccupations des entrepreneurs ou du gouvernement… Comme on le voit ci-dessous, la contrainte vitale au maintient de la structure de béton est appliquée sur des câbles coulés dans le béton au moment de la construction; lorsque le béton est figé, on enlève la tension hydraulique, mais les câbles conservent leur tension parce qu’ils sont coulés dans le béton. La corrosion due aux infiltrations d’eau dans les failles du béton peut compromettre cette tension, en œuvrant dans ce milieu opaque et impénétrable…
Il est peu facile de faire l’entretien de Champlain; on ne peut, comme c’est le cas pour le pont Jacques-Cartier, en remplacer des sections de dimension réduites et de continuer à l’utiliser en même temps.
Remplacer le pont Champlain, au moment de l’écriture de ce billet en 2011 coûterait 6 milliards de dollars…
Quelques photos ci-dessous pour compléter le panorama: