Mon père, au début des années cinquante, a travaillé dans un camp de bûcheron au Témiscamingue, à la chute du pin rouge, sur le lac Kipawa. Ce lieu est à -78.61111, 46.84111 selon toponymie Québec.

Le rapide du Pin Rouge haut de la rivière Kipawa, Témiscamingue, P.Q., ligne du C.P.R.
L’album universel, Vol. 23, no. 1160, pp. 353 (21 juillet 1906)
Le propriétaire des droits de coupe était un dénommé Booth. Celui-ci délèguait un responsable de camp qui s’occupait d’exploiter une portion du territoire, et à son tour, ce responsable engageait quelques des bûcherons. Ce responsable entretenait le camp et sa femme s’occupait de la cantine. On y mangeait du lard salé, et au dessert – de la tarte aux raisins (fait à base raisins séchés). Il y avait 8 bûcherons au camp où mon père travaillait.
![Plan of Barnet & Mackie's Timber Limits on River Kipawa . - Échelle [1:63360]. 1 mille au pouce . - 1870 - 1 carte(s) : n&b ; 60 x 75 cm - BANQ P228,S1,P45](https://histoireduquebec.files.wordpress.com/2013/08/booth-1.png?w=640&h=453)
Plan of Barnet & Mackie’s Timber Limits on River Kipawa . – Échelle [1:63360]. 1 mille au pouce . – 1870
– 1 carte(s) : n&b ; 60 x 75 cm – BANQ P228,S1,P45

Exemple de coupe au godendart – tiré de http://public.sogetel.net/munstesabine/foresti.htm
Cependant, lorsque l’arbre était encore debout, la méthode était la suivante: on commençait par faire une entaille sur le tronc au godendart. Ensuite, dans cette entaille, on insérait un « coin » de métal en le frappant avec le dos de la tête de hache. La coupe continuait alors, et le coin permettait de diriger l’arbre à l’opposé de la face où il était inséré. Pour un très gros arbre, on utilisait deux coins d’acier.
Le « siège de barbier » arrivait parfois, surtout en hiver, des dires de mon père: l’arbre en train d’être coupé cassait soudainement, laissant une ou des éclisses plus ou moins longues plantées sur la bûche. Le danger était alors que l’arbre partait sans crier gare, dans une direction aléatoire. Pourquoi cela se produisait davantage en hiver? Le bois était alors plus cassant et moins ductile? Peut-être…
Certains de ces pins étaient si énormes qu’une fois tombés, on déposait le godendart sur la souche, et le tronc du pin dépassait encore de chaque côté. On parle donc d’arbres de plus de cinq pieds de diamètre…! Dans une région aussi froide que le Témiscamingue, nul doute que cela représente des centaines d’années de croissance… Un arbre si énorme était coupé en longueur de 12 pieds; s’il était moins gros, on pouvait couper sur 16 pieds. Les chevaux ne pouvaient traîner directement un si lourd poids; on le traînait de travers, en le tirant d’un bout puis de l’autre en alternance et en glissant sur des billots . Le but était donc d’empiler le bois dès l’automne, et jusqu’au printemps; à la fonte des glaces, la crue se chargeait d’emporter le bois vers les scieries au sud. Une bille de cinq pieds de diamètre sur 12 pieds de long, ça devait faire un sacré ravage dans un cours d’eau…
Pour se rendre au campement, on utilisait le bateau; parfois l’hydravion, mais le pilote avait tendance à prendre beaucoup d’alcool…!
Des inventaires forestiers on été faits à l’époque – une forêt de pins blancs, de pruche, de cèdre… bien peu de pin rouge.